La ville suspendue

Champ social et associatif

La ville suspendue

avec Catherine Larré, 2019-2020

«  La ville suspendue » est un projet conçu et mis en œuvre par le CPIF et l'artiste Catherine Larré dans le cadre d' « Entre les images » - dispositif Diagonal pour une éducation à l'image par et avec la photographie réalisé avec le soutien du ministère de la Culture et l'association Paris d'Exil.

Plusieurs semaines durant, entre la fin 2019 et le début 2020, en quelques dix séances, des Mineurs Non Accompagnés, tous originaires d’Afrique subsharienne, créent des collages photographiques avec l’artiste Catherine Larré. 

Ils flânent d’abord dans divers quartiers de Paris, dont certains leur sont familiers et d’autres au contraire étrangers : République, Goutte d’Or et Tour Eiffel, entre autres. Appareils photographiques en main, ils marchent, explorent puis photographient ce qui retient leur attention. Ensuite ils vont au Musée du quai Branly-Jacques Chirac. Là ils photographient, encore, des objets, des statuettes et des masques cette fois, dont certains sont issus de leurs propres cultures. 

Enfin, dans un atelier du 16ème arrondissement, ils mélangent les images: la rue et le musée, l’ici et l’ailleurs, le présent et le passé, le profane et le sacré, le monstrueux et le banal, la photo et le dessin sont rapprochés. Ces images, souvent, ont la force de l’inattendu. Elles disent le rire, l’effroi, la surprise, le mystère et la sorcellerie. Elles habillent Paris d’un regard tout à la fois neuf et très ancien : un regard qui fait planer et veiller sur elle toutes sortes d’esprits vivifiants. 

Dans son travail, Catherine Larré n’a de cesse de métamorphoser la matière photographique. C’est ce goût de la métamorphose, qu’elle souhaite partager avec les jeunes. 

Un livret mêlant images, textes et témoignages a été édité en juin 2020.

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Biographie : 

Photographe plasticienne, née en 1964, Catherine Larré compile, collectionne et archive des images, créant ainsi un vaste catalogue sans cesse renouvelé, dans lequel elle puise pour extraire une matière à transformer.

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Extrait du journal de bord du projet :

4/11/2019

La tour Eiffel 11H / 13 H 30
Sont présents Alpha Bah, Koutoubou, Boubou et Ali.

Petit tour du Trocadéro à la tour Eiffel. L’ironie des sans-papiers Sénégalais qui vendent les Tours au pied de la Tour à rêve (centaines de Selfies sous toutes ses formes). Beaucoup de policiers, on observe les déplacements chez les vendeurs, on reste groupé pour éviter les contrôles de papiers... Nous sommes interpellés par un vendeur, à la sortie de la fosse de la tour, qui présente un jeune, ne parlant pas français, comme “mineur”. Il a un oeil fermé, a l’air mal, je demande s’il a fait son évaluation, ils ne connaissent pas le résultat. On fait le signalement auprès de HLR* pour qu’ils aillent à sa rencontre lors de leur maraude mercredi. Quand nous parlons de la situation, un peu plus tard les jeunes me répondent que “c’est la vie”. Boissons chaudes. Un peu secouée par la matinée. 232 photos.

*Association Hors La Rue - soutien aux enfants étrangers en danger

21/11/2019

République/Champs Elysée / 10 H 30 / 13 H 30

Sont présents Amadou Cissoko / Nouha Doukouré / Bouba Koulibaly (ne peut pas rester car il a son RDV avec l'ASE* pour une possible sortie sèche** de l’hôtel où il est ; il prend un appareil photo avec lui) / Daye Cibi.

Nous nous retrouvons Place de la République pour regarder/choisir les photos en vu de réaliser les tirages qui serviront à la phase 2.
Les 4 jeunes qui sont présents ne sont jamais venus... donc choix d’un nouveau temps de prise de vue dans la ville. Refus ferme d’aller voir les “restes” de l’évacuation de la Porte de la Chapelle. Les jeunes décident d’aller sur les Champs Elysées. Visite de toutes les grandes boutiques, les sculptures de jeunes noirs en « survet » chez Vuiton, chez Dior analyse des influences africaines et orientales, finalement les jeunes semblent très à l’aise à déambuler dans ces temples du luxe, on compare les prix avec celui des copies sur les marchés. Place de l’Etoile. Déjeuner au Mc Do, un sdf mal en point dans les escaliers, les toilettes sont payants. Avant de se séparer les jeunes demandent de visiter les Galeries Lafayettes, l’un d’eux demande à une vendeuse de poser pour lui. Au moment de sortir, un vigile nous interpelle pour raconter longuement son parcours migratoire depuis le Sénégal. Il rappelle à la petite équipe de ne jamais oublier d’où ils viennent, d’être fiers de leur culture, de ne jamais lâcher. Nous nous retrouvons dans la rue. Grand moment de silence et tout le monde se sépare un peu ému.

*Bureau Aide Sociale à l’Enfance. **Sortie définitive

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Crédits :

© Photographies réalisées dans le cadre de l’atelier « La ville suspendue » développé par le Centre Photographique d’Ile-de-France et encadré par l’artiste Catherine Larré. Le projet s’inscrit dans le dispositif « Entre les images » du réseau national Diagonal, soutenu par le Ministère de la Culture. Tous supports pour le monde entier et la durée légale de protection des œuvres.

 

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